Sur tes ruines j’irai dansant, extrait des premières lignes

Sur tes ruines j’irai dansant

Ferme ta gueule. Ferme ta gueule tia pas de bouche. Je te dirai de la fermer jusqu’à ce que les dents elles me tombent. Si y faut. Je m’en fous. Je te glapis de mes chicots. Va, va, ferme-la, les dents je les ai encore et le cul je te le mords. Mais toi ferme-moi ça, que tia plus rien dedans. Que tié plus rien. Tié ? Tié quoi ? Tia même plus de port, plus de voiles dedans et d’abord jamais tien as eu. C’est moi qui te le dis. Ferme tes voiles. Claque pas. Tié que du vent. Et moi je te lâche des pets.
Tu entends. Les pets je te les lâche. Je t’étouffe, je te consume, je te tréblinkase. Je te l’ai dit mille fois tié grosse, tié sale et puis tu sens mauvais. Tu l’as pas encore compris. Tu te prends pour ? Tu te prends, je te quitte. Je te cague. Je te merde. Je te défie, je te défie moi. Pour la cause que ma belle salope moi tu m’auras pas. Va te faire. Tié pas capable. Qui voudrait te mettre ? Un tas.
Un tas tié. Je monte sur tes collines et je te défie, et je te regarde et toi tu crois que j’existe pas, qui moi ? Moi j’existe pas ? Moi qui sera ta perte ! Pauvre grosse folle. Je t’escrache. Et en plus tu le sais. Tu te tournes la tête, tu me tournes la tête et pourtant, pourtant le coup y t’arrive, y t’arrive bronche pas. Allez laisse-toi faire, laisse-toi finir que tié plus rien qu’un gros tas de vase plein de vents et de soupirs et de poubelles et de fantômes et que toujours tu rugis.
Quoi ? Quoi ? Tu veux pas te laisser faire, tu crois que personne y te gagne à la bagarre ? Non mais ho ! C’est fini tout ça. Y suffit de t’affronter. Le bruit que tu vas faire quand tu vas tomber. Ho ma belle pourriture le bruit que tu vas faire, j’aurai pas assez de bras pour applaudir, pas assez d’oreilles pour t’entendre dégringoler et de Pampérigouste on en verra la fumée. Fume, tia perdu, tu fais ta grosse et ton monstre mais y suffit de t’affronter, de pas te craindre même que tu rugis, que tu couines et moi je te défie, je te cague, je te merde, je te pête mon acné à la gueule. Ecoute bien monstre marin tu est défiée. Je te défie. Samson Derrabe-Farigoule te défie. Tu vas voir le judo. Tia pas fini de souffrir, tia pas fini de morfler. Morfle !

Voilà qu’elle gémit, qu’elle s’étire la belle, qu’elle imite l’antique, qu’elle paraît Io, qu’elle mime la vache grasse et tous les Tranche-Montagnes de la création se laisseraient saisir, détourner, prendre à cet embellissement de son fond mauvais. Halte voyageur ne t’arrête pas, ne campe pas sur les ruines de la ville, ne rêve pas sur ses tumulus, la belle est carogne et jalouse et sous ses airs parfois empruntés cache sa faiblesse naturelle qui est sauvagerie de goule. Elle mangera ton cadavre pauvre errant, misérable passant qui passe et sucera tes os. Tu croyais ingénu d’autres latitudes t’arrêter cinq courtes minutes pour le cas échéant contempler ce magnifique coucher de soleil sur les Iles d’Or, ce rouge midi dont des déments pinceurs de lyre t’avaient décrit l’innéfable et irrésistible charme pour ne pas aller jusqu’à parler de beauté. Pauvre nomade tu n’erres plus, tes pieds se fixeront à sa tourbe qu’elle aura masquée en gazon, asphalte méridionale ou terreau de boulodrome. Tu seras pauvre innocent digéré ou détruit, car elle ne te laissera pas le choix, la fausse douce. Et tes hurlements feront ricaner et suer de plaisir un certain nombre d’êtres étranges ou immondes qui peuplent son obscurité. Tu mourras.
Je te le dis, te le prédis, te l’annonce, passant passe ou plutôt ne passe pas à moins que soudain ne surgisse le plus terrible des enfants que la ville eût porté jusque-là dans ses flancs, moi. Moi, Samson Derrabe-Farigoule, moi son ennemi juré, sa perte, son ange exterminateur, moi qui peux seul arrêter son venin et sa digestion innommable.

Et peut-être, nocher imprudent, me devras-tu ton salut.

© Les éditions du Fioupélan